Le climat est déréglé. Il y a urgence à réduire nos émissions de gaz à effet de serre à l’échelle globale. La Suisse entend faire sa part. Dans sa Stratégie énergétique 2050,laConfédération souhaite, notamment, réduire la pollution de l’environnement liée à la consommation d’énergie. L’assainissement du parc immobilier constitue l’un des leviers pour atteindre les objectifs climatiques de notre pays. En effet, selon l’Office fédéral de l’énergie (OFEN), les bâtiments sont à l’origine de près de la moitié de la consommation d’énergie totale et génèrent un tiers des émissions de CO2 .Au cours des prochaines années, il va donc falloir, entre autres, remplacer de nombreux systèmes de chauffage utilisant des énergies fossiles par des dispositifs fonctionnant aux énergies renouvelables, et revoir l’isolation des immeubles pour améliorer leur efficacité énergétique.
Plus d’un million de bâtiments à assainir
«En Suisse, on estime que plus de 1,5milliondebâtimentsdoiventêtre assainis en raison de leur mauvaise efficacité énergétique», a indiqué René Leutwyler, membre du comité central de la Société suisse des entrepreneurs (SSE), lors de la conférence de presse annuelle de l’organisation faîtière du gros œuvre et du géniecivil,le23févrieràZurich(lire notre édition du 2 mars). Or, le taux d’assainissement n’atteint actuellement que 0,9%, a-t-il déploré: «À cette vitesse, il faudra cent ans pour rénover tout le parc immobilier. Pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, ce taux doit être multiplié par trois.» Le chantier est donc aussi vaste qu’important. Le secteur de la construction est bien conscient de l’enjeu et des besoins en main d’œuvre qu’il implique. Sous l’égide de Suisse Énergie (un programme de l’OFEN), la SSE a d’ailleurs participé, avec d’autres acteurs, au projet «Offensive de formation du secteur du bâtiment» en 2021.Elle a aussi lancé, au début de cette année, un plan d’action en 12 points pour faire avancer la modernisation du parc immobilier suisse.
Besoins de spécialistes
Pour la branche, cela va nécessiter d’embaucher des ouvriers spécialisés et de former les travailleurs déjà en activité. Un vrai défi pour le domaine, d’autant qu’il fait déjà face à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Les études visant à estimer les besoins structurels du secteur sont rares et datent, peut-on lire dans un rapport établi sur mandat de Suisse Énergie. Celui-ci précise toute fois que, selon les estimations des représentants de la branche et des milieux de la formation, la pénurie sévit en particulier dans des professions telles que charpentier, constructeur d’installation de ventilation, installateur en sanitaire ou en chauffage, monteur frigoriste, étancheur, couvreur, façadier, physicien de construction ou encore chef de projet en montage solaire et contremaître en ventilation.
Redorer l’image des métiers de la construction
Autant pour lutter contre la pénurie de main-d’œuvre qualifiée globale que pour répondre aux besoins de spécialistes liés directement à la transition énergétique des bâtiments, la construction va devoir déployer de gros efforts. À commencer par redorer l’image de ses métiers. «C’est davantage un problème en Suisse romande qu’en Suisse alémanique, car les jeunes romands sont plus attirés par les études académiques que par l’apprentissage en général et par les métiers de la construction en particulier», remarque Christian Schärer, responsable de la formation supérieure à la SSE. «Le problème est accentué dans le canton de Genève, où l’économie est très tertiarisée, c’est-à-dire tournée vers les services, et où, sous l’influence culturelle de la France tout proche, on privilégie les études gymnasiales.