Pour les entreprises de notre pays, retenir les talents, en particulier les cadres, va être la priorité numéro une cette année, suivi de près par l’attraction de ces mêmes candidats. C’est ce qu’affirme Robert Walters dans son étude de rémunération 2022.Le réseau international de cabinets de recrutement, spécialisé dans les cadres moyens et supérieurs des secteurs de la finance, du droit, des technologies et du consulting, a interrogé enligne, entre septembre et octobre 2021,400managers et entreprises en Suisse. Les résultats révèlent notamment qu’un manager sur deux ayant répondu à cette enquête aspire à changer d’emploi au cours des prochains mois. Cette proportion très importante confirme les inquiétudes des entreprises: 85% déclarent être préoccupées par la rétention de leurs collaborateurs et 72% par la pénurie de talents.
Envie de changement plus forte qu’auparavant
Directeur du bureau genevois de Robert Walters Suisse, Guillaume Blanchin note que cette intention est plus forte que les années précédentes, où elle s’établissait plutôt autourdes40%, selon lui. Avant de relativiser: «Ce n’est pas parce que 50%des cadres disent vouloir changer d’emploi qu’ils vont le faire. Nous nous attendons plutôt à ce que 15 à 20% d’entre eux concrétisent cette envie de changement, ce qui, cela dit, est déjà assez élevé.» Le responsable ne s’attend donc pas à un phénomène d’une ampleur comparable à la «grande démission» aux États-Unis où, depuis plusieurs mois, des millions de travailleurs, insatisfaits de leur emploi et/ou de leur salaire, ont donné leur congé.
Les motivations au changement sont plurielles, indique Guillaume Blanchin: «Classiquement, il y a le besoin d’évoluer professionnellement, d’acquérir de nouvelles compétences, d’occuper un poste plus intéressant ou de diriger une équipe, par exemple. Il y a aussi le souhait d’exercer une activité, une fonction qui a du sens et de travailler pour une entreprise dont on partage les valeurs.» La recherche de sens et les valeurs de l’entreprise sont deux critères de sélection de plus en plus importants du point de vue des candidats, relève-t-il. Le spécialiste ajoute que des conditions de travail plus flexibles pour assurer un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée sont également des aspirations de plus en plus souvent exprimées: «Le télétravail est un phénomène irrémédiable. Les entreprises qui n’acceptent pas une part de home office dans leur organisation du travail risquent de perdre en attractivité, tant auprès de leurs employés déjà en place que des candidats qui pourraient hésiter à les rejoindre», estime-t-il.
Hausses significatives de salaires attendues
«Dans l’ambiance anxiogène de la crise sanitaireduCovid-19, certains cadre sont mis sous cloche pendant les deux dernières années leur projet de changer de poste, explique Guillaume Blanchin. Mais maintenant que la situation épidémiologique semble s’améliorer, ils entendent franchir le pas.» Le signe aussi, pour lui, de la confiance dans une économie suisse structurellement saine et solide, et dans son marché du travail attractif. Dans ce contexte de guerre des talents exacerbée, les cadres tiennent le couteau par le manche vis-à-vis des employeurs et des recruteurs. Pour conserver comme pour attirer les meilleurs profils, les entreprises vont devoir se montrer généreuses et créatives. Car cette année, les managers s’attendent à voir leur rémunération augmenter: 36% d’entre eux souhaitent une hausse de salaire significative (la proportion a bondi de 13%par rapport à 2021) et 56% un bonus, fait apparaître l’étude de Robert Walters. Le salaire est désormais pour les cadres le troisième critère de satisfaction le plus important, derrière la culture d’entreprise et les modalités de travail flexible. «Les cadres estiment n’avoir pas obtenu d’augmentation notable de salaire au cours des deux ou trois dernières. Ils escomptent cette année un rattrapage, d’autant plus que la crise sanitaire semble sur le point de s’achever, que l’activité économique a repris et qu’il y a un fort besoin en recrutement», explique Guillaume Blanchin. D’après l’enquête de Robert Walters, certains cadres pourraient en profiter davantage que d’autres. Cela devrait être le cas en particulier dans le domaine de la technologie. Ainsi, en moyenne, les ingénieurs en cybersécurité s’attendent à une hausse de leur rémunération de 17% et les ingénieurs de cloud computing de 8%, alors que les ingénieurs en data et les spécialistes en analyse des données visent une augmentation de 7%. Dans le domaine de la finance, les fiscalistes aspirent à une revalorisation jusqu’à +6%. «Il s’agit de secteurs d’avenir et de fonctions déjà stratégiques pour les entreprises, explique Guillaume Blanchin. Ces profils sont aussi «pénuriques» qu’ils sont courtisés; certains peuvent recevoir plusieurs offres d’emploi par mois.» Patrons, à vos porte-monnaie!