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en Suisse romande
L’offre de consultation psychologique en ligne cible aussi bien la clientèle privée que les entreprises qui souhaitent proposer ce service de soutien à leur personnel.
L’aide psychologique low cost pour le personnel des entreprises
22.09.2022 | 16:00
Un psy quand je veux, où je veux. La pandémie de coronavirus a créé un nouveau marché pour les hot-lines de soutien aux collaborateurs.
GETTY IMAGES
Il fallait sauter sur l’occasion. L’augmentation des risques psychosociaux au travail représente un nouveau filon qui n’a pas échappé à Instahelp. Vers 2015, cette entreprise autrichienne (lire ci-contre) se lance dans le soutien psychologique en ligne, avec pour ambition de «révolutionner notre monde de la consultation et proposer une solution numérique afin de rendre le soutien psychologique accessible au plus grand nombre». La société autrichienne entame à cet effet une collaboration avec la Faculté de psychologie de l’Établissement privé d’enseignement supérieur Sigmund Freud, à Vienne. Concrètement, Instahelp propose des consultations psychologiques en ligne, par chat, vidéo ou téléphone, par le biais d’une application téléchargeable sur ordinateur, smartphone outablette informatique. L’offre cible aussi bien la clientèle privée que les entreprises qui souhaitent proposer une solution de soutien psychologique au personnel.

Arguments persuasifs
Invoquant les listes d’attente interminables chez les psychologues, l’avantage des échanges virtuels pour limiter la propagation des virus, la hausse des risques psychosociaux au travail et la difficulté de se libérer en pleine journée pour aller consulter un thérapeute, Instahelp se positionne avec des arguments persuasifs sur un marché en plein essor. L’entreprise promet en outre un délai de réponse rapide – quelques minutes pour fixer un premier rendez-vous au plus tard le lendemain – et une disponibilité jour et nuit, toute l’année, à partir de 89 francs seulement par semaine. Bref, Instahelp introduit le concept low cost dans le monde de la psychologie. Cependant, il n’est pas question de prestations au rabais. Les psychologues «sont choisis avec le plus grand soin», lit-on sur le site de l’entreprise. Ils sont qualifiés, disposent d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans en cabinet et ont suivi avec succès une formation supplémentaire de conseil enligne. Résultat: en 2020, après le début de la pandémie, Instahelp aurait enregistré une progression de 30%desdemandes sur les marchés autrichiens, allemands et français. Difficile d’obtenir des renseignements précis pour la Suisse. Sur la version francophone du site, on trouve les profils de 22 psychologues, mais ces derniers ne sont pas forcément basés en Suisse; il semble même que ce soit plutôt l’exception que la règle. La plateforme serait fonctionnelle dans tout le pays depuis 2018, selon la directrice commerciale Silvia Geier, contactée par e-mail. «Nous avons démarré en 2015 en Autriche avec six psychologues et disposons maintenant d’une équipe de 200 psychologues dans l’espace DACH(ndlr : Allemagne, Autriche et Suisse), en France et au Royaume Uni», indique-t-elle. Au cours des dernières années, Instahelp a publié plusieurs offres d’emploi sur internet, dont l’une au printemps 2021, pour recruter des psychologues cliniciens en Suisse romande. «Exploitez votre plaisir à travailler et vos compétences afin de simplifier l’accès au soutien psychologique», disait-elle. L’annonce énumérait ensuite les avantages, comme la «flexibilité du temps de travail et du lieu» qui permet aux psychologues de consulter en dehors des heures conventionnelles, «que ce soit depuis votre ordinateur, votre tablette ou votre smartphone». Pour ce qui est des salaires, il semble qu’ils aient augmenté. Dans une annonce datant d’il y a quelques années, les candidats suisses se voyaient proposer une rémunération de 50 francs ou de 90 francs l’heure, selon le type d’abonnement du client: «light» ou «standard» (soit 40 ou 60 minutes de consultation hebdomadaire, respectivement).

Scepticisme
Inutile de dire que tous les professionnels ne voient pas ce nouveau débouché d’un bon œil. «La richesse de notre travail, c’est la rencontre. Faire ce travail par écrit, je n’y crois pas une seconde. Le problème, c’est que si le contact est superficiel, l’effet aussi est superficiel», déclare ainsi la psychologue Catherine Vasey, fondatrice de la société NoBurnuut à Lausanne. Plusieurs de ses confrères admettent que les consultations par Zoom ou Skype sont envisageables dans certaines situations. Cependant, il existe déjà des chats et des services gratuits, en particulier La Main Tendue (le 143) qui fonctionne en permanence pour répondre au besoin d’écoute de la population. Alors pourquoi payer? Si la personne veut aborder un sujet sérieux, les avis sont pour ainsi dire unanimes: le contact en face-à-face apparaît indispensable. Du reste, Instahelp précise sur son site que «la consultation en ligne n’est pas adaptée si vous vous trouvez en situation de crise ou d’urgence aiguë, ou si vous savez déjà que vous souffrez d’un trouble avéré.» Dans ce cas, la société vous assistera «pour trouver un psychologue ou spécialiste à proximité de chez vous». Par ailleurs, il ne vous sera pas possible d’obtenir un diagnostic, «en raison des conditions juridiques» qui encadrent la pratique psychothérapeutique. Instahelp constitue en fin de compte une offre «complémentaire» et «supplémentaire» aux consultations classiques en cabinet privé.

Efficacité à l’étude
L’entreprise n’est d’ailleurs pas seule ni nouvelle sur le marché du conseil psychologique en ligne. Les premières offres commerciales sont apparues en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne, il y a plusieurs décennies de cela. Une quantité d’études ont été effectuées en vue de déterminer leur efficacité. Mais l’expression «interventions enligne» a souvent été utilisée dans ces recherches comme un terme générique, «sans plus de précisions sur la méthode mise en œuvre», selon la Fédération suisse des psychologues (FSP), à Berne. Par conséquent, il est difficile de tirer des conclusions à ce stade, surtout sur tel ou tel service en particulier. De récentes études menées en Suisse ont toutefois pointé les «effets globalement positifs du conseil psychologique en ligne».
Francesca Sacco